En menant des recherches dans les fonds d’archives de la justice, j’ai
pu mettre au jour un dossier surprenant de cour d’assises relatif à un crime
commis en réunion envers le personnel des douanes d’Angoulins. Je vous propose ici
de découvrir la présentation détaillée réalisée avec l’examen de centaines de
pages de procédure. Mais, au-delà de ce récit, c’est bien toute la vie
de la douane en poste à Angoulins et même d’un village qu’il convient de saisir
en filigrane : L’organisation d’une brigade, le contrôle de la
penthière, les acteurs du milieu rural aunisien du début du XIXe siècle, les
gestes et objets de la vie quotidienne, l’architecture sociale etc. paraissent
en effet à qui veut les voir au fil de cette histoire qui vous emmènera des
salines d’Angoulins jusqu’à la salle d’audience de la cour criminelle.
Le premier février 1809, sur les
dix heures du soir, se présente en mairie la femme de Charles Perault,
lieutenant des préposés aux douanes impériales au poste établi à Angoulins.
Cette dernière déclare avoir été alertée par le nommé Gourreau, un farinier :
Elle rapporte en effet qu’il y a moins d’une demi-heure, au moulin du Pont de
la Pierre, se sont rendus deux préposés de la brigade d’Angoulins dans un état déplorable et baignant de sang. Les deux douaniers
ont reçu plusieurs cicatrices au corps et
à la tête et comme ils ne pouvaient se
trainer plus loin, ils ont alors été allongés par le meunier sur ses lits. Sans attendre, le maire
d’Angoulins, Elie Bérigaud, fait mander le garde champêtre et prévenir aussi le
receveur des douanes Benoit Joseph
Dutouquet lequel se mit en marche avec le
garde-champêtre et autres personnes pour aller au dit moulin prendre des
informations sur les faits et l’état des deux malheureux.
Une fois rendue sur place, la
troupe apprend des deux blessés qu’étant, de nuit, placés en embuscade sur le
chemin qui va du Pont de la Pierre au Pas des Eaux, ils ont vu quatre faux-sauniers de pied, à eux inconnus
ayant des sacs sur leurs épaules et du sel dedans. Dutouquet, face à ses
hommes qui ont la figure et la tête
déchirée en plusieurs endroits et que l’hémorragie est à son comble interroge plus avant le plus lucide des deux.
Ce dernier lui déclare qu’ayant voulut s’interposer et arrêter les quatre
individus, ils furent assaillis de coups
de bâtons et autres instruments.
Le chef de la douane angoulinoise
envoie donc chercher Pierre Etienne Cadot un officier de santé qui se trouve en
sa maison de campagne à Aytré. Le commissionnaire lui demande d’aller porter
secours à deux préposés qui ont été
assassinés. Le soignant qui se
transporte chez le farinier trouve alors les deux blessés couchés et sans parole et raconte : « Je me suis arrêté à celui qui m’a paru le
plus dangereusement blessé que l’on m’a dit se nommer Louis Robert. J’en ai
fait l’inspection et ai trouvé sa lèvre supérieure gonflée, les dents incisives
ébranlées, une renversée en dedans que j’ai été obligé d’extirper. J’ai vu sous
le menton une plaie transversale large de deux pouces qui m’a paru être faite
avec un couteau qui avait divisé les ligaments. J’ai trouvé sous son maxillaire
du côté droit, une forte contusion, la glande maxillaire très grosse et les
parties environnantes très équimosées ce qui m’a paru être l’effet d’un fort
coup de bâton. Continuant ma recherche, j’ai trouvé le testicule du côté droit
très gros (...) son ventre douloureux, ce que j’ai pensé être l’effet de coups
de pieds. Après avoir employé, envers ce malade, la saignée, pansé les plaies
et porté tous les secours que nécessitait supposition, j’ai fait la visite du
second que l’on m’a dit se nommer Pierre Legurelier. J’ai vu une plaie sur la
partie moyenne de l’occipital qui faisait une esse et large trois pouces et
plusieurs fortes contusions sur les pariétaux et l’os frontal. Les paupières
meurtries, une partie de la fesse équimosée qui m’a paru être l’effet de
plusieurs coups de poing et de bâton. J’ai également pansé la plaie, employé la
saignée, les vulnéraires et tous les moyens que nécessitaient leur malheureuse
position. »
Vu l’état dans lequel se trouvent
les deux préposés qui sont dans
l’impossibilité de pouvoir eux même rédiger leur rapport, c’est Charles
Durdez, le contrôleur de brigade, qui recueille, au moulin même, toutes les circonstances et les
particularités relatives à la présente affaire. Ce récit détaillé est remis
dès le lendemain aux mains du magistrat de sureté pour enclencher les
poursuites dans les formes que la loi détermine. Le quatre février, Jean-Pierre
Lescuyer, le juge de paix du canton, visite les deux blessés qui ont été transportés
à l’hôpital Auffredi de La Rochelle et leur relit cette déposition « hier après le coucher du soleil et le
lever de la lune, étant sur le chemin qui conduit du Pont de la Pierre à la
grande route de La Rochelle à Rochefort, nous avons vu quatre hommes chargés de
chacun un sac rempli. Nos qualités préalablement déclarées, nous les avons
sommés au nom de la loi de s’arrêter et de nous déclarer ce que contenaient les
sacs dont ils étaient porteurs, à quoi ils ont répondu que c’était du sel,
qu’ils n’avaient aucune expédition à nous présenter, qu’ils étaient des
malheureux, nous priant de les laisser gagner leur vie, ont à l’instant posé
leurs sacs à terre et se sont assis dessus. Nous les avons invité de nouveau à
venir avec nous au bureau de la Douane avec leur sel ainsi que de nous dire
leur noms et prénoms, domiciles et professions, à quoi ils n’ont rien répondu,
se sont au contraire mis en devoir de recharger leurs sacs sur leurs épaules
pour continuer leur route, ce que voyant, moi dit Robert ai jeté le sac d’un
d’eux par terre les sommant derechef de venir avec nous au dit bureau à qui ils
se sont formellement refusés, ont tous jeté leurs sacs par terre et nous ont
entourés. L’un d’eux, le plus petit, qui se trouvait derrière moi dit Robert,
m’a porté un coup de la trique ou massue dont ils étaient porteurs sur la tête
et m’a renversé par terre. Je me suis aussitôt relevé, le menaçant de mon fusil
s’il récidivait. Et ne voulant acquiescer à nos sommations, au contraire d’y
satisfaire et d’être intimidés par nos menaces m’en a porté un second coup que
j’ai paré avec mon fusil dont le canon en est plié. Un autre d’entre eux m’en a
également porté un coup par derrière que je n’ai pu éviter, les deux autres
tenaient et mutilaient aussi mon confrère qui ne pouvait me porter aucun
secours ni moi à lui ce que voyant et cherchant à me débarrasser d’un des deux
qui me frappaient, je me suis servi de mon fusil comme d’un bâton que j’ai jeté
par la tête du plus petit d’entre eux et que je reconnaitrait s’il m’était
représenté. Les coups redoublés qui m’étaient portés m’ont fait tomber par
terre sans connaissance, cependant peu de temps après revenu à moi même, je me
suis trouvé étendu par terre baigné dans le sang qui coulait de mes plaies, à
côté de mon confrère également aussi maltraité que moi et sans connaissance de
même que le plus petit d’eux à qui j’avais jeté mon fusil par la tête, les sels
répandus çà et là, nos armes éparses excepté le pistolet de moi Legurelier qui
s’est trouvé enlevé. Dans cet état, nous nous sommes rendus à la maison du
nommé Gourreau, meunier au Pont de la Pierre, distant du lieu de la scène
d’environ douze cent pas, auquel nous avons fait part de tout ce que dessus, le
priant de nous assister et d’en prévenir nos chefs, ce qu’il a fait ne pouvant
nous transporter plus loin par la perte du sang qui coulait de nos plaies et
des douleurs vives et aigües que nous occasionnaient les différents coups qui
nous ont été portés. Deux des sacs ont été ramassés sur le lieu de la scène par
le nommé Charles Brunet , mesureur des sels, demeurant au dit Angoulins,
l’un d’eux des dits sacs marqué à une pièce cousue d’un P et d’un G en coton
rouge, l’autre marqué en toutes lettres d’un gros DECOUR lesquels sacs seront
déposés aux mains de monsieur le magistrat de sureté de cet arrondissement pour
valoir que qu’il appartiendra, et les sels répandus sur le chemin et dans un
fossé de manière à ne pouvoir être ramassés. » Le reconnaissant alors comme
sincère et véritable, Legurelier et Robert signent péniblement le rapport.
Le six février, le magistrat de
sureté de l’arrondissement de La Rochelle transmet les procès verbaux de
l’affaire au procureur général de la cour de justice criminelle spéciale du
département de la Charente-Inférieure. La lettre qui les présente insiste sur
la gravité des violences exercées contre
ces deux préposés dans l’exercice de leurs fonctions. Le magistrat précise
que la gendarmerie est à l’oeuvre afin de découvrir quelques renseignements qui puissent mettre sur la voie des coupables,
notamment grâce aux lettres qui sont sur
les sacs.
De son côté, le maire d’Angoulins
mène aussi l’enquête. Déjà, la nuit des faits, alors qu’il revenait dans le
bourg avec son garde-champêtre, Elie Bérigaud s’inquiète d’éclats de voix qui
émanent du cabaret de Véron. Exerçant son droit de police, il entre mais ne
trouve que cinq joyeux particuliers buvant et chantant, étant marchands de la campagne circonvoisine
présents ici pour faire leur chargement le lendemain et qu’ils ne paraissaient
pas suspects. Dans les jours suivants, plus inspiré, il fait mander les nommés Decourt et Gabarret
que d’aucuns soupçonnaient d’être du nombre des auteurs du délit.
Dans une lettre du neuf février le directeur des douanes s’adresse au magistrat
de sureté à La Rochelle pour rapporter ces éléments et nous apprenons ainsi que
seul s’est présenté au maire d’Angoulins le nommé Decourt et le second qui devait s’y rendre avec le
garde-champêtre a au contraire disparu après avoir fait dire par sa soeur qu’il
était allé consulter monsieur Garreau ; mais ce qui vient encore à l’appui
des soupçons qu’on a sur cet individu c’est qu’il a fait demander par Decourt
un délai de quelques jours pour comparaitre, lequel délai pourrait lui être
nécessaire pour cicatriser de blessures si, comme on a lieu de le croire à
raison du rapport de sa taille, il est le mieux que celui désigné par les
préposés pour avoir été blessé par eux en se défendant.
Le jour même, les éléments
contenus dans cette lettre déterminent Roy, le magistrat de sureté, à décerner des
mandats d’amener contre les deux suspects Decourt et Gabarret la coïncidence de leurs noms avec les
marques que constate le procès-verbal des préposés lui ayant paru un indice
suffisant pour prendre cette mesure et que la circonstance lui a paru rendre urgente. C’est en ces termes
qu’il en informe le procureur et qu’il ajoute : « pour que ces deux particuliers ne se
blanchissent pas complètement du soupçon dont ils sont l’objet je les fais
provisoirement détenir jusqu’à ce que vous m’ayez fait connaitre vos intentions
à leur égard. J’ai chargé la
gendarmerie de visiter dans le domicile des prévenus s’il s’y trouve des sacs
ou linges dont les marques soient conformes avec celles des sacs saisis (...) »
Le 11 février, les gendarmes impériaux
de La Rochelle François Grosnoury et Georges Legros, se présentent munis du
mandat d’amener chez le maire. Celui-ci
raconte dans les détails la descente dans son procès-verbal :
« nous sommes, avec les gendarmes
susnommés, notre garde-champêtre et la grande majeure partie de la brigade des
douanes de cette commune transportés au hameau de Lisleau où étant sur environ
une heure de l’après midi, les gendarmes et préposés se sont placés à toutes
les issues des maisons des dits Decourt et Gabarret, la porte et fenêtre de la
maison de ce dernier étant fermée, nous sommes passés au domicile de Decourt et
parlant à sa femme nous lui avons demandé où était son mari que nous désirions
lui parler. Elle a dit et fait réponse qu’il était chez Boutet à Lisle, pour
repasser une serpe sur la meule à aiguiser. De suite, nous avons député un
gendarme et le garde-champêtre chez le dit Boutet qui a déclaré n’avoir pas vu
le dit Decourt. Ce fait, le maire a demandé à la femme de ce dernier son nom,
prénoms ainsi que ceux de son mari, a dit que celui-ci se nommait Germain Decourt
et elle Marie Auprêtre, et sur le champ elle a été requise de nous représenter
ses sacs de toile et autres linges qu’elle pouvait avoir chez elle à tout quoi
elle a satisfait, elle nous a montré deux sacs dont l’un est mouillé qui n’a
aucune marque et ensuite quelques serviettes deux desquelles sont ouvrées, une
grosse et une fine marquées en rouge portant les lettres initiales de G.D
n’ayant pu reconnaitre l’autre linge à aucune marque. Les gendarmes se sont
saisi des deux serviettes ainsi marquées pour y avoir recours aux besoins. Le
maire poursuivant ses recherches et toujours dans l’intention de découvrir Decourt
est sorti de chez celui-ci accompagné des gendarmes et garde-champêtre et de
suite passé dans la maison circonvoisine chez le nommé Louis Marboeuf vigneron,
lui a demandé et à sa femme s’ils n’avaient pas vu Decourt, ont déclaré que
non, et d’après en avoir fait la recherche chez eux dans deux appartements bas
et n’avoir pu le découvrir, le maire s’est aperçu qu’il y avait une chambre
haute ou grenier au-dessus la chambre d’habitation du dit Marboeuf et une
ouverture en forme de trappe pour y entrer. En avons demandé l’échelle pour
pouvoir y monter que le dit Marboeuf nous a déclaré en se décomposant et très
embarrassé qu’il n’en avait pas ou qu’il ne savait pas où elle était, l’ayant
requis de nous en procurer une sur le champ ou quelque chose équivalent pour
nous mettre en même d’y monter, il a apporté un boyard ou civière à l’aide duquel
le garde champêtre et un gendarme se sont introduits dans ce grenier et faisant
la recherche de Decourt, il s’est trouvé caché entre la paillasse et le lit et
a été sur le champ appréhendé au corps au nom de sa majesté l’Empereur et Roi
et pour descendre de ce grenier le garde champêtre s’est aperçu d’une échelle
de meunier qui s’est trouvée dans le haut de ce grenier sans doute hissée par
le dit Decourt lorsqu’il y a monté se cacher. (...) ». Quoique fermée,
il est décidé de retourner inspecter la maison du premier suspect. Le garde-champêtre connaissant les lieux
ouvre une fenêtre donnant sur les jardins sans
y faire aucune fracture et étant entrés nous n’avons pu y découvrir le dit
Gabarret. Ceci fait, en examinant du
linge tendu sur une petite corde, nous avions vu quatre chemises sur lesquels
il y a chacune les lettres initiales de ses noms et prénoms en rouge P.G, l’une
desquelles chemises les gendarmes se sont saisis pour être présentée quand
besoin sera. Cette visite terminée, tous sortent de cet appartement et se
transportent dans la maison de Marboeuf où est détenu et gardé à vue Decourt. La
femme du suspect prend alors en aparté le maire et lui fait des
révélations : elle déplore d’abord son sort et celui de ses pauvres
enfants mais avoue, à lui seul dans un appartement retiré, que son mari n’était pas coupable comme on le supposait mais qu’il
était vrai qu’il s’était trouvé malheureusement dans la compagnie des nommés
Alexis Jard, demeurant à Loubinat commune de Salles, le dit Gabarret et Louis
Marboeuf fils canonnier et que ce sont ces trois derniers dénommés qui avaient
été chercher du sel en fraude et qui avaient rencontré des préposés qu’ils
maltraitèrent et que lui son mari le dit Decourt était innocent quant aux voies
de faits exercées sur ces préposé ». Le procès verbal d’arrestation et
des perquisitions dressé par les gendarmes est moins circonstancié mais il confirme
toutefois en tous points le déroulé de l’action décrite par le maire et ajoute
que deux fusils chargés - un de chasse
chez Decourt et un de calibre de guerre chez le dit Gabarret - ont aussi été
saisis.
Dès le lendemain, le 12 février le magistrat de
sureté Roy reçoit l’interrogatoire provisoire de Germain Decourt :
- Quel sont
vos noms, âge, profession et domicile ?
- Je me nomme Germain Decourt, âgé de 48 ans,
vigneron, demeurant à Angoulins
- Dans la
nuit du trente-un janvier au premier février n’étiez-vous pas avec les nommés
Alexis Jard, Pierre Gabarret et Marboeuf canonnier, sur les salines voisines
d’Angoulins ?
- Oui monsieur,
malheureusement
-
N’étiez-vous pas chargés chacun d’un sac de sel ?
- Oui
monsieur, chaque sac pouvant en contenir un boisseau mesure de Marans.
-
N’étiez-vous pas armés ?
- Non
monsieur ! Non plus que moi...
-
N’aviez-vous pas de bâtons ?
- Nous avions
un petit morceau de bois
- Deux
préposés ne vous ont-ils pas arrêté ?
- Oui
monsieur
- N’avez-vous
pas fait résistance à ces préposés ?
- Non Monsieur,
ce n’est pas moi et j’ai été saisi que je ne saurais dire ensuite ce qui s’est
passé
- Quels sont
ceux qui ont fait violence aux préposés ?
- J’ai vu le
nommé Jard porter un coup de bâton à l’un d’eux qui est tombé sur le coup et
Marboeuf et Gabarret ont tombé sur le second. Je ne me suis pas apperçu qu’ils aient
fait usage d’autre chose que de leurs bâtons
- Quel est
celui de vous trois qui a été blessé par les préposés ?
- Je n’ai pas
connaissance qu’ils aient été atteints par les préposés, nous nous sommes
retirés et comme ils marchaient tous trois plus vite que moi je les suivais
autant qu’il m’était possible
- Où vous
êtes vous retirés ?
- Chacun chez
nous.
- A qui
appartenaient les sacs où était contenu le sel ?
- Nous avions
chacun un sac qui appartenait à chacun de nous, Gabarret seulement avait un
doublet.
- Comment
était marqué le vôtre ?
- Je ne vous
le dirais pas ne sachant ni A ni B
- Où
demeurent Alexis Jard et Gabarret ?
- Jard
demeure à Loubinat dépendant de Cramahé commune de Salles, Gabarret demeure à
Lisleau commune d’Angoulins
Dans sa lettre au procureur le magistrat
l’informe encore de toutes les avancées de l’enquête et précise qu’un nouveau mandat
est désormais délivré à l’encontre des deux nouveaux suspects.
Une semaine plus tard, faisant un
nouveau point sur l’affaire à son supérieur, Roy écrit à nouveau au procureur et
ne peut que constater que les trois autres suspects demeurent insaisissables.
Il déplore : « il est fâcheux que les premiers
renseignements qu’on a recueillis ne m’aient pas été transmis. L’avis qu’on en
a donné au maire du lieu et l’invitation qu’il a adressée à ceux qu’on a
désigné de se rendre chez lui leur a donné l’éveil des soupçons dont ils
étaient l’objet et ils ont pris la fuite. On ne peut cependant pas accuser
l’intention du maire car c’est à lui que l’on doit l’arrestation de Decourt qui
s’était réfugié chez Marboeuf père où il n’a été trouvé que sur l’indication du
maire. »
Par ailleurs, un autre courrier
du même nous apprend avec plus de précisions comment les noms de Decourt et
Gabarret avaient pu parvenir jusqu’au maire avant le 9 février : « j’ai cherché à m’instruire des indices qui
avaient mis sur la voie pour faire reconnaître Decourt et les autres. Voici ce
qui s’est passé à cet égard. Monsieur Durdez, capitaine des préposés à Aytré
cherchant à reconnaitre les auteurs du délit est allé avec le sieur Dutouquet,
receveur des douanes à Angoulins dans diverses maisons pour prendre des
informations à cet égard. En entrant chez le nommé Decourt, ils furent frappés
de la sensation que fit sur lui leur apparition et sa manière dont il répondit
aux différentes questions qui leur firent fortifier leurs premiers soupçons et
crurent même reconnaitre un bâton dans la forme de ceux qu’on leur avait dit
avoir servi aux faux-sauniers auteurs du délit. Ils allèrent aussi chez
Gabarret où on leur parla de même, d’une manière équivoque, notamment la soeur
de ce particulier. Ils firent part de ces soupçons au maire qui fit prévenir
ces particuliers de passer chez lui sous des prétextes supposés. Decourt s’y
rendit, Gabarret s’y refusa, ce qui confirme les soupçons qu’on avait sur son
compte . »
L’arrestation de Decourt qui donna
lieu aux aveux qui firent connaitre les trois autres et leur évasion prompte du Pays porte Pierre Hector Savary, le
procureur général, à croire qu’ils n’ont pas été désignés à tort. Il délivre,
le 22 février, des mandats de dépôt à l’encontre des prévenus, du chef de crime de contrebande de sel tel et ce à main
armée et avec attroupement. Il mande ainsi à tous huissiers ou gendarmes
impériaux sur ce requis de se saisir des personnes nommées Alexis Jard, Pierre
Gabarret et Louis Marboeuf et de les conduire et déposer en la maison de
Justice séant à Saintes. Mais ils demeurent introuvables. Les gendarmes
témoignent le 16 mars de leurs vaines recherches. Ils n’ont pu que notifier les
mandats à Pierre Simonnet cultivateur, plus proche voisin des dits Marboeuf Gabarret
et Jard qui ont abandonnés leurs domiciles.
Le 24 mars on apprend que le nommé Marboeuf semble s’être retiré vers
Ruffec dans un atelier de forge à fer.
Le 27 mars, la procédure judiciaire
s’accélère : le procureur général Savary donne avis, des mandats de dépôt
décernés et rappelle les faits énoncés par les différents procès verbaux,
rapports et interrogatoire. Il conclue en dénonçant que ce brigandage malheureusement trop multiplié est tout à la fois
attentatoire aux droits du Gouvernement et à la sureté individuelle de ses
agents et que la connaissance en est attribuée aux cours spéciales par la loi
du 13 floréal de l’an XI. C’est en ces termes qu’il porte plainte contre
les dits Decourt, Gabarret, Marboeuf et Jard à raison du délit cité et qu’il requiert en conséquence qu’il lui en soit donné acte et qu’il soit
procédé dans le plus court délai à l’interrogatoire de Decourt et instruit
contre les trois autres prévenus par contumace. Enfin, il requiert que les
témoins, au nombre de onze, soient
appelés le plus tôt possible pour faire séparément et par écrit leurs
déclarations.
Le lendemain, le 28, en
conséquence de la plainte du procureur, monsieur Godet, juge de la cour est ainsi
chargé de délivrer cédule pour l’audition des onze témoins qui sont :
Louis Robert, 25 ans, le premier préposé des douanes victime ; Pierre Legurelier,
25 ans, le second préposé agressé ; Pierre Etienne Cadot, âgé de 47 ans,
l’officier de santé intervenu la nuit des faits ; le maire d’Angoulins
Elie Bérigaud âgé de 45 ans ; Benoit Dutouquet, âgé de 36 ans, le receveur
des douanes ; Charles Durdez, 49
ans, le contrôleur des douanes à Aytré ; Marguerite Roché, 41 ans, épouse
du lieutenant Perault des douanes d’Angoulins ; le farinier Jean Gourreau
âgé de 54 ans ; Louis Paillet, 41 ans, le garde-champêtre de la
commune ; Jean Rollin lieutenant d’ordre à Angoulins, 55 ans ; et
enfin Charles Brunet, 42 ans, mesureur en sel à Angoulins. Le juge Godet est surtout
aussi commis pour procéder à l’interrogatoire de Germain Decourt détenu à la
maison de Justice du département, ce qu’il fait dès le 29 mars :
- Quels sont vos nom, surnoms,
âge, profession, lieu de naissance et demeure ?
- Je me nomme Germain Decourt,
vigneron, âgé de 48 ans, né à Saint-Médard et demeurant à Angoulins depuis la
Toussaint dernière
- Le premier février dernier,
dans l’après midi, ne vous êtes vous pas trouvé avec trois autres individus sur
le chemin qui conduit du pont de la Pierre à la grande route de Rochefort à La
Rochelle ?
- Oui monsieur
- Quels sont les individus qui
étaient avec vous ?
- Ils se nomment Louis Marboeuf
fils, Pierre Gabarret et le nommé Jard, tous cultivateurs, demeurant les deux
premiers à Angoulins et le dernier à Salles
- N’étiez vous pas chargés
chacun d’un sac plein de sel ?
- Nos sacs n’étaient pas pleins,
ils nous eu été impossible de les porter, ils ne contenaient qu’un boisseau
environ mesure de Marans
- Ne fîtes vous pas rencontre
des préposés de la douane au poste d’Angoulins et ceux ci ne vous sommèrent-ils
pas de vous arrêter, de leur déclarer ce que contenaient vos sacs et si vous
étiez nantis d’une expédition qui vous permit de les transporter ?
- Il est vrai que nous
rencontrâmes deux préposés qui nous parlèrent, mais comme j’entends un peu
difficilement je ne sais pas bien ce qu’ils nous dirent, tout ce que je sais
c’est que nous leur dîmes que nous étions de pauvres pères de familles que les
sels que nous emportions étaient pour notre usage et non pour les revendre,
qu’en conséquence nous les prions de nous laisser passer.
- Les dits employés ne vous
sommèrent-ils pas de leur dire vos noms, prénoms, domiciles, professions et ne
gardâtes vous pas le silence sur cette demande ?
- Je ne l’ai pas entendu
- Au lieu de répondre à la
demande des dits employés ne rechargeâtes vous pas vos sacs pour continuer votre route et sur ce que l’un
d’eux jeta le sac de l’un de vous par terre, les autres ne déchargèrent ils pas
les leurs et tous ensemble n’entourâtes vous pas les préposés et ne leur
portâtes vous pas plusieurs coups des triques ou massues en forme de bâtons
dont vous étiez porteur et ne les renversâtes vous pas par terre sans
connaissance ?
- Il est vrai que les trois
individus qui étaient avec moi ont frappé les employés, mais moi je ne les ai
pas touchés, je n’avais qu’un simple bâton pour m’appuyer et qui n’était gros tout
au plus que comme le petit doigt
- De quelle grosseur à peu près
pouvaient être les bâtons de vos compagnons de voyage ?
- Je n’y pris pas bien garde. Je
crois cependant qu’ils étaient de la grosseur du pouce.
- Comment vîtes-vous ainsi
frapper les employés sans chercher à vous opposer ?
- Cela a été plus tôt fait que je ne le croyais
et d’ailleurs comment aurais-je pu empêcher trois hommes de maltraiter ces
employés ?
- Vous n’aviez donc pas payé les
droits du sel que vous emportiez ?
- Non monsieur
- Qui vous avez livré ces
sels ?
- Personne. Nous les avions pris
à un tas où Marboeuf nous conduisit et il était convenu que si nous parvenions
à les rendre chez nous nous les paierions à ceux à qui ils appartenaient.
- Vous en connaissiez donc le
propriétaire ?
- Non monsieur, mais en nous en
informant nous aurions bien su à qui ils appartenaient
- Vous vous avouez doublement
coupable : d’abord d’un vol, puis d’une infraction aux lois de l’Etat en
transportant des sels sans en avoir acquitté les droits ?
- C’est vrai, j’ai eu ce malheur
là, mais ce n’a été qu’à l’instigation de mes camarades qui sont venus me
chercher chez moi dans un moment où j’y pensais le moins, ils sont les auteurs
de ma perte, ainsi que de mes cinq enfants et de ma malheureuse épouse et ce
qui me chagrine le plus c’est celui de mes enfants qui est au service de la
patrie dès l’année dernière qui ne s’attend point à ce cruel événement qui
m’arrive cependant sans que je sois coupable sinon que de m’être trouvé dans
une aussi mauvaise compagnie
Faisant suite à l’assignation datée du 29 mars, les onze témoins sont
alors convoqués pour faire leurs déclarations sur les faits. C’est l’huissier
audiencier Pierre Nicolas Janson qui se présente à chacun d’eux le 31 mars et
leur signifie avec une copie de la cédule leur citation à comparaitre au Palais
de Justice. Malheureusement Pierre François Thomas Legurelier ne pourra s’y
rendre car il décède, près d’un mois après son agression, le 5 avril, des
suites de ses blessures. L’extrait mortuaire délivré par l’hôpital Auffredy
nous apprend qu’il était né le 7 novembre 1772 à Boulleville dans le
département de la Manche de Pierre et de Françoise Jean. Le chirurgien Cadot en
charge de nombreux patients, est quant à lui exempté par sa hiérarchie de se rendre pour être entendu sur les faits
et circonstances de la procédure instruite. Ce sont donc neuf témoins qui comparaissent,
le samedi 8 avril, devant Pierre Godet, premier juge des cours de justice
criminelle et spéciale du département de la Charente-Inférieure et son greffier
François Nadeau. Leurs témoignages sur les faits mentionnés dans la plainte
portée par le procureur nous sont parvenus. Après eu avoir lecture des
différents procès verbaux joints à la procédure, ils déclarent :
Jean Rollin (lieutenant d’ordre à Angoulins, 55 ans) : que le premier février , étant sur les 10h
du soir avec un préposé de la douane en embuscade au lieu appelé Vinaigre, il
n’a pu s’apercevoir de ce qu’il s’est passé dans le chemin qui va du Pont de la
Pierre au Pas des Eaux, qui se trouve à 1/2 quart de lieue environ du lieu de
Vinaigre, et se rendant au bourg, pour aller inspecter d’autres embuscades, il
fit la rencontre de la femme Nadeau, mesureur de sel du dit lieu d’Angoulins,
qui lui dit « Vous ne savez donc pas Monsieur, qu’on vient d’assassiner
deux de vos préposés, qu’on a laissé sur place tellement maltraités, qu’on les
croit morts » qu’à cette nouvelle le déposant se transporta de suite chez
Monsieur Bérigaud, maire, pour s’assurer si cet événement avait réellement eu
lieu, ce que le dit maire lui confirma, qu’alors, après l’avoir prié de faire
quelques visites chez quelques individus que le déposant suspectait, le dit
déposant se transporta sur le lieu où la scène s’était passée, où il vit en
effet quatre sacs de sel, placés par terre, qu’il dissémina de manière à ce
qu’on ne pu plus s’en servir et instruit du lieu où s’étaient rendus les
employés maltraités qui étaient chez le nommé Gourreau, meunier d’Angoulins, il
s’y transporta de suite et vit chacun sur un lit, les sieurs Robert et
Legurelier, presque couverts de sang et dans un état déplorable, tant ils
avaient été cruellement maltraités qu’il y vit aussi le sieur Cadot officier de
santé qui s’y était rendu pour leur porter quelque soulagement et qui les
saigna en sa présence. que s’étant ensuite rendu à la douane, il en parti avec
Monsieur Durdez, contrôleur pour se rendre de nouveau chez le dit Gourreau où
le dit sieur Durdez reçu la déclaration des dits Robert et Legurelier sur tous
les faits qui s’étaient passés les concernant et en dressa procès verbal. Qu’il
y vit deux sacs dont l’un était marqué DECOUR en lettres rouges et l’autre sur
une petite pièce qui y était adaptée des lettres P.G également formées en coton
rouge.
Louis Robert, 25 ans, le premier préposé des douanes victime, réitère
mot à mot ce qui figure dans le premier rapport dressé par Charles Durdez. Il
ajoute cependant que si les prévenus de
l’attentat commis sur leur personne lui étaient représentés il pourrait en
reconnaitre quelques uns. Le juge prend alors le parti de donner des ordres
pour que le capitaine de la gendarmerie veuille extraire le détenu Germain Decourt,
lequel est introduit dans la chambre du
conseil où étant en présence du déposant nous avons interpellé ce dernier de nous
dire s’il connait le dit Decourt pour faire partie des quatre hommes qui l’ont
assailli (...) Louis Robert après avoir scrupuleusement examiné le dit Decourt
déclare qu’il peut bien se faire qu’il
fût du nombre des quatre assaillants mais qu’il ne le connait pas pour en avoir
fait partie...
Dépose ensuite Benoit Dutouquet, le receveur des douanes à Angoulins : le
premier février, vers les 9 à 10 heures du soir, venant de veiller chez le
sieur Personnat, lieutenant des gardes-côtes et rendu chez lui pour se coucher,
il entendit heurter à sa porte. Que s’étant enquis de qui c’était et ce qu’on
lui voulait, le garde-champêtre Louis Paillet se nomma et lui dit que deux
préposés venaient d’être assassinés et qu’ils étaient au moulin du Pont de la
Pierre. Qu’aussitôt le déposant se hâta de se munir de quelques armes et de se
rendre au dit moulin. Qu’arrivé dans ce lieu et chez le nommé Gourreau,
meunier, il vit chacun dans un lit, les sieurs Robert et Legurelier, préposés
des douanes dans l’état le plus déplorable, ayant la figure couverte de sang et
les autres parties du corps meurtries. Qu’il aperçut même dans la chambre où
ils étaient, plusieurs traces de sang qui indiquaient qu’ils en avaient
beaucoup perdu. Ajoute le déposant qu’il chercha à savoir de ses deux préposés
s’ils connaissaient les individus qui les avaient ainsi assaillis mais qu’ils
lui dirent qu’ils n’en connaissaient aucun. Que voyant la position désespérante
où se trouvaient ses deux employés, le déposant envoya d’une part chercher un
officier de santé pour leur administrer des soins et de l’autre monsieur Durdez
contrôleur pour qu’il se rendit auprès des dits préposés pour recevoir leur
déclaration et en dresser procès verbal ce qui fut fait. Après quoi le déposant
se rendit chez le sieur Bérigaud, maire d’Angoulins pour l’inviter à faire
quelques perquisitions afin de découvrir s’il était possible les auteurs de
l’assassinat de ces deux préposés. Qu’il lui indiqua même le domicile de
personnes qu’il soupçonnait et le maire en effet fit quelques recherches qui
furent infructueuses. Quelques jours après, se rappelant que parmi les pièces
de conviction qui étaient restées sur le lieu de la scène, il y avait un sac
marqué du nom de DECOUR. Il prit des informations sur le fait de savoir où pourrait
résider un individu de ce nom et quelqu’un l’ayant instruit qu’il en demeurait
un à Lisleau, commune d’Angoulins, il en prévint monsieur Durdez qui convient
avec lui qu’ils feraient des démarches chez ce particulier pour s ‘assurer
si en effet il n’était point un des auteurs de l’assassinat dont il s’agit.
Qu’en conséquence ils s’y rendirent ensemble, s’adressèrent d’abord chez le
nommé Gabarret, l’un des accusés, pour savoir où résidait Decourt. Que là deux
femmes se présentèrent à qui ils demandèrent la résidence de Decourt laquelle
elles leur indiquèrent après quoi ils demandèrent à ces femmes le nom de celui
qui occupait la maison même où elles étaient et elles répondirent
« pourquoi nous demandez vous cela ? que le déposant et le sieur
Durdez leur dirent que c’était seulement pour le savoir et que s’il le
voulaient absolument ils le sauraient malgré leurs hésitation à le dire qu’après
ce colloque le déposant et le sieur Durdez se rendirent chez Marboeuf qui
réside au même lieu et le sieur Durdez seulement étant entré dans la maison il
y trouva Marboeuf, son fils et le nommé Jard, qu’il demanda au dit Marboeuf où
demeurait Decourt et que le dit Marboeuf lui ayant indiqué la maison de ce
particulier, le déposant et lui s’y rendirent qu’ayant questionné le dit Decourt
qui était à table avec ses enfants et une femme étrangère, sur ce fait de
savoir s’il avait connaissance de l’assassinat dont il s’agit, il répondit
qu’il n’en avait absolument aucune connaissance ; et alors sans que nous
annoncions le moindre soupçon contre le dit Decourt, son épouse prit la parole
et dit « Croyez vous que mon mari soit coupable d’une chose comme cela,
nous qui avons un fils à la défense de la Patrie ? qu’un instant après
arrivèrent chez le dit Decourt, le nommé Jard et les deux femmes que nous
avions trouvé dans la première maison à laquelle nous nous étions adressés et
qui n’avaient pas voulu nous dire leur nom ; qu’ayant dit à ces femmes
croyez vous que parce que vous n’avez pas voulu nous dire vos noms, nous ne
savions pas également que nous étions chez Gabarret ? La femme étrangère
dit alors « Certainement ces messieurs savent bien qu’ils étaient chez
Pierre Gabarret, qui est ton frère, en s’adressant à l’une d’elle. »
Charles Durdez, 49 ans, le contrôleur des douanes à Aytré, déclare
lui que le premier février étant couché,
sur les onze heures du soir vint heurter à sa porte le nommé Charles Brunet,
mesureur des sels, qui dit au déposant qu’on venait d’assassiner deux de ses
préposés sur le chemin qui conduit du pont de la Pierre au Pas des eaux et
qu’ils s’étaient rendus à peine chez le nommé Gourreau, meunier, où ils étaient
peut-être morts au moment où il parlait ; qu’à cette nouvelle, le déposant
se leva, envoya cherche le sieur Cadot chirurgien qui se rendit chez lui et
comme il leur avait fallu du temps pour s’habiller et préparer les chevaux, il
était à peu près deux heures du matin quand ils se rendirent chez le dit
Gourreau. Que là ils virent chacun dans un lit, les préposés Robert et
Legurelier dans l’état le plus déplorable ayant la figure toute couverte de
sang ainsi que leurs mains tant ils avaient cruellement été excédés ; que
tandis que l’officier de santé leur administrait des soins, le déposant
cherchait à savoir d’eux les circonstances de leur assassinat, que ne les
trouvant point alors avec assez de connaissance pour qu’ils lui en rendirent
exactement compte, il attendit jusque vers les 10h où il les questionna de
nouveau sur ce point et les trouvant alors un peu revenus à eux et dans le cas
de lui répondre plus pertinemment ils lui rendirent toutes les circonstances et
de la fraude commise par les individus qui les avaient assailli, et de
l’assassinat même qu’ils s’étaient permis sur leurs personnes desquels faits et
circonstances le déposant fit le détail dans un procès verbal (...) observe
cependant le déposant que les sacs dont il est parlé au dit procès verbal
avaient été enlevés de dessus la place et les sels répandus qu’après le départ
des dits Robert et Legurelier et d’après les dits ordres de lui déposant que
par conséquent ces deux préposés n’ont pu être témoins de cette
opération ; que quant à l’incertitude qui réside du dit procès verbal sur
l’heure à laquelle la fraude et l’assassinat dont il s’agit ont eu lieu les
dits Robert et Legurelier lui ont déclaré comme ils l’ont affirmé devant le
juge de paix du canton de l’Est de La Rochelle qui s’est transporté à cet effet
à l’hospice civil où étaient les deux préposés, que ces événements s’étaient
passés après le coucher du soleil et le lever de la lune le dit jour premier
février ; et dit de plus le déposant que réfléchissant sur le nom Decour
qui s’était trouvé marqué sur l’un des dits sacs, il résolut de faire quelques
recherches pour savoir s’il ne résiderait point à Angoulins ou aux environs quelqu’un
de ce nom et qu’ayant appris qu’il en existait un individu à Lisleau portant ce
nom il s’y transporta avec le sieur Dutouquet receveur de la Douane qu’arrivés
au dit lieu ils allèrent d’abord chez Gabarret l’un des accusés où deux femmes
vinrent à la porte leur demander ce qu’ils voulaient qu’ils leur demandèrent si
ce n’était pas ici que demeurait Decourt, que ces femmes leur répondirent que
non et leur désignèrent la maison dudit Decourt, qu’alors le déposant leur
dit « comment vous nommez vous donc vous même ? » à
quoi elles répondirent qu’elles ne savaient pas leur nom, ce qui éleva dans
l’esprit du déposant et du sieur Dutouquet quelques soupçons contre l’habitant
de cette maison ; que le déposant et son collègue se rendirent ensuite
chez le nommé Marboeuf, que le déposant seul y entra et ayant demandé si ce
n’était point là que demeurait Decourt, on lui dit encore que non, puis ils se
rendirent chez le dit Decourt qui était à table avec ses enfants et une femme
étrangère, lorsque sa femme mangeait au coin du foyer ; que là le déposant
demanda au dit Decourt s’il n’avait point ouïe parler de l’assassinat qui
venait d’être commis sur deux personnes au chemin qui conduit du pont de la
Pierre au Pas des Eaux et s’il ne savait point quels en pouvaient être les
auteurs qu’à cette question le dit Decourt parut un peu embarrassé et garda
quelque temps le silence ; cependant un moment après, il répondit qu’il
n’en avait d’autre connaissance si ce n’est qu’il en avait entendu parler au
prône du dimanche par le curé du lieu ; qu’un instant après arrivèrent
chez le dit Decourt le nommé Jard et une des fils de la maison de Gabaret à qui
le déposant dit « Voilà une fille qui tout à l’heure n’a pas voulu me dire
son nom, mais si j’avais voulu savoir où était Gabarret, je l’aurais bien
trouvé » sur cela la femme étrangère qui était chez le dit Decourt prit la
parole et dit à la même fille « Crois tu que ces messieurs ne connaissent
pas ton frère Pierre Gabarret ? » Observe le déposant que ces
différentes circonstances, prises d’une part, de l’hésitation des filles
Gabarret de dire leur nom, de l’autre de la rencontre de Jard chez Marboeuf et
enfin du transport du dit Jard et de la fille Gabarret chez Decourt,
annonçaient de leur part des anxiétés qui lui firent violemment soupçonner
ainsi qu’au sieur Dutouquet son collègue que les quatre individus Gabarret,
Jard, Marboeuf et Decourt pouvaient être les auteurs des fraudes et assassinat
dont il s’agit.
Le maire d’Angoulins, Elie Bérigaud, âgé de 45 ans, pour sa part réitère
exactement le contenu de ses deux rapports dont nous avons déjà parlé et
reconnait aussi les pièces à conviction saisies lors des perquisitions.
Charles Brunet, 42 ans, mesureur en sel à Angoulins. Il déclare que le premier février, étant couché vers les
dix heures du soir, vint heurter à sa porte la servante du sieur Bérigaud,
maire d’Angoulins, qui lui dit de la part de son maître qu’il fallait qu’il se
rendit de suite chez le nommé Gourreau au moulin du Pont de la Pierre, que
déférant à cet ordre, il se rendit de suite chez le dit Gourreau où il trouva
le sieur Dutouquet, receveur des Douanes qui lui dit de repartir de suite pour
aller à Aytré avertir M Durdez qu’il eut à se rendre chez le dit Gourreau pour
y dresser procès verbal de l’assassinat qui venait d’être commis sur deux de
ses préposés, qu’il se mit sur le champ en route et passa sur le chemin qui
conduit du pont de la Pierre au grand chemin de Rochefort et rencontra dans
l’endroit où probablement l’assassinat s’était commis, deux tas de sel ;
que rendu chez le dit sieur Durdez celui ci lui donna l’ordre de retourner de
suite dans l’endroit où il avait trouvé ce sel et d’y faire la recherche pour
savoir s’il ne s’y rencontrerait point quelques objets qui puissent tendre à
faire découvrir les auteurs du dit assassinat ; que le déposant s’étant en
effet transporté sur le champ au lieu étaient les tas de sel, il y arriva sur
les onze heures environ et favorisé dans ses recherches par la clarté de la
lune, il rencontra sur le dit lieu, un sac et un bissac dont il se saisit puis
il se rendit chez Gourreau où il croyait trouver monsieur Dutouquet qui en
était parti ; que là il vit le nommé Robert, l’un des préposés assaillis,
ayant la figure toute couverte de sang et qui était au lit dans l’état le plus
déplorable ; qu’il ne fit point attention à l’autre employé également
assailli ; qu’ayant demandé au préposé qui gardait ses collègues s’il lui
serait de quelque utilité et celui ci lui ayant répondu que non, qu’il pouvait
aller se reposer, il partit de suite et se rendit chez lui muni du sac et du
bissac qu’il avait trouvé. Que le lendemain deux février, sur les 8 à 9 heures
du matin, il se transporta avec ces deux effets chez le sieur Dutouquet
receveur des Douanes à Angoulins où se trouva le sieur Durdez contrôleur à qui
il remit le sac et le bissac dont il s’agit ; que ces messieurs lui
demandèrent si ces objets étaient marqués il leur dit que ne connaissant que
les lettres sans pouvoir les assembler et lire il avait aperçu sur une pièce
qui était adaptée au bissac un P qu’il n’avait pas pu trop bien connaitre
l’autre lettre, non plus que le nom qui était écrit sur le sac ; qu’alors
ces messieurs firent mention dans leur procès verbal de la remise qui leur fit
des dits sac et bissac.
Louis Paillet, 41 ans, le garde-champêtre de la commune : étant couché vers les 9 à 10h du soir, la
servant du sieur Bérigaud, maire d’Angoulins vint heurter à sa porte et lui
dire qu’il fallait qu’il se levât de suite et allât parler à son maître, ce que
fit le déposant et rendu chez le dit Bérigaud, celui-ci lui dit « Il faut
que vous alliez chez monsieur Dutouquet, receveur de la douane, pour lui dire,
de ma part, qu’il veuille bien se rendre avec vous, sur le champ, chez le nommé
Gourreau, au moulin du Pont de la Pierre, chez lequel se sont trainés avec
peine, deux de ses préposés qui viennent d’être assassinés il y a un instant,
ainsi qu’on me l’a rapporté (...) qu’aussitôt le déposant fut chez le sieur
Dutouquet lui faire part de ce que venait de lui dire le sieur Bérigaud et ils
partirent ensemble pour se rendre chez le dit Gourreau où ils virent chacun
dans un lit, les deux préposés qui venaient d’être assassinés, ayant la figure
toute ensanglantée et toutes les autres parties du corps couvertes de coups et
de contusions, au point que l’un d’eux ne put leur parler et que l’autre, le
sieur Robert, pouvait peine articuler
quelques mots ; que de suite le déposant et le sieur Dutouquet se
rendirent à Angoulins pour y chercher de l’eau de boule qu’ils ne trouvèrent pas,
puis retournèrent chez le dit Gourreau où le sieur Rollin lieutenant d’ordre de
la douane ayant invité le déposant de se joindre à lui et d’autres employés
pour aller sur le lieu où l’assassinat avait été commis, ils se transportèrent
ensemble au dit lieu qui se trouve sur le chemin du Pont de la Pierre au Pas
des Eaux ; que là ils virent quatre tas de sel que le dit Rollin dissémina
de manière à ce qu’on ne pu plus s’en servir (...) ajoute le déposant que le
onze février ayant été requis par le sieur maire d’Angoulins de se transporter
avec lui, des gendarmes et des préposés de la douane au lieu de Lileau,
domicile des nommés Gabarret, Jard, Decourt et Marboeuf, il déféra à cet ordre
et rendus au dit lieu ils allèrent d’abord chez le dit Gabarret qu’ils ne
trouvèrent pas et dont les portes de la maison été fermées, que le déposant
ouvrit une petite fenêtre prenant jour sur le jardin par laquelle ils
s’introduisirent dans la dite maison et vérification faite du linge qui s’y
trouva étendu sur une petite corde on y trouva quatre chemises marquées en
coton rouge des lettres initiales P.G., de l’une desquelles le sieur Bérigaud
maire se saisit et remit aux gendarmes pour y avoir recours au besoin. Passés
ensuite au domicile du nommé Decourt, la femme de ce particulier fut requise de
présenter son linge parmi lequel on trouva deux serviettes ouvrées portant les
lettres initiales G.D. marquées en coton rouge dont monsieur le maire se saisit
également et qu’il remit aux gendarmes. Que s’étant enquis à la femme du dit Decourt
où il était, elle répondit qu’il était allé à Lisle chez le nommé Boutet pour y
faire aiguiser une serpe ce qui fut vérifié faux. Ajoute le déposant que
s’étant transporté toujours dans la même compagnie chez le nommé Louis
Marboeuf, on fit la visite dans les appartements bas de sa maison et n’y ayant
rien trouvé on aperçu une chambre haute ou grenier régnant au dessus, laquelle
avait pour issue une trappe au plancher ; que monsieur le maire ayant
donné ordre au déposant de s’y introduire il fut question pour cela de se
procurer une échelle que le dit Marboeuf se refuse de donner, mais monsieur le
maire ayant insisté pour en avoir une, Marbeouf apporta un boyard au moyen
duquel le déposant s’introduisit dans la dite chambre où faisant les plus scrupuleuses
recherches, il découvrit entre la paillasse et le lit, le nommé Decourt dont il
se saisit et qui fut appréhendé par les gendarmes. Observe le déposant que ce
fut Marboeuf père qui hésita à donner l’échelle pour monter dans son grenier et
que lors qu’il se saisit du dit Decourt il ne dit autre chose si ce n’est
« Ah mon Dieu ! ».
Marguerite Roché, 41 ans, épouse du lieutenant Perault des douanes
d’Angoulins : elle déclare que le
1er février dernier, elle était couchée vers les neuf à dix heures du soir
lorsque le nommé Gourreau, meunier du moulin du Pont de la Pierre, vint heurter
à sa porte et lui dire que deux des préposés de la douane s’étaient trainés à
peine chez lui venant d’être assassinés sur le chemin qui conduit du Pont de la
Pierre à la grande route de Rochefort autrement appelé le chemin vert,
événement qui saisit extrêmement la déposante dans la crainte que son mari fut
un de ces individus assassinés que la déposante ayant dit au dit Gourreau que
le sieur Félix lieutenant des douanes qui occupe la même maison n’y était pas
dans le moment le dit Gourreau l’invita d’aller avec lui chez le sieur Bérigaud
maire d’Angoulins ce qu’elle fit et le dit Gourreau ayant fait part au dit
maire de l’assassinat qui venait d’avoir lieu, ce dernier qui était indisposé
par une fièvre de rhume envoya sur le champ prévenir le garde champêtre et le
sieur Dutouquet receveur de la douane pour qu’ils eussent à se transporter chez
le dit Gourreau et y prendre tous les renseignements possibles sur les
circonstances de l’assassinat de ces deux préposés ce qu’ils firent de
suite ; et la déposante voulant se tirer d’inquiétude sur le sort de son
mari ne tarda pas à les suivre chez le dit Gourreau où elle vit chacun dans un
lit les sieurs Robert et Legurelier dans l’état le plus déplorable presque sans
vie ayant la figure toute couverte de sang et les autres parties du corps
remplies de coups et de contusions que ne pouvant tenir à un pareil spectacle
et tranquille sur le sort de son mari elle se retira de suite chez elle.
Le farinier Jean Gourreau âgé de 54 ans : il a déclaré que le 1er février dernier, arrivant du lieu des Fontaines
où il était allé chercher du blé et se sentant fatigué, il prit sur les sept
heures du soir moment de son arrivée quelques aliments et se coucha ; que
vers les neuf heures environ, la femme et les enfants du déposant qui étaient
occupés autour de leur moulin virent arriver le sieur Robert employé de la
douane marchant à peine et tout couvert de sang qui leur dit que lui et son
collègue Legurelier venaient d’être assassinés sur le chemin qui conduit du
Pont de la Pierre à la grande route de Rochefort ; que de suite après
avoir fait entrer le dit Robert chez elle la femme du déposant alla le
réveiller pour lui faire part de ce cruel événement et il se leva puis son
épouse et ses enfants allèrent vers le lieu de l’assassinat et rencontrèrent le
dit Legurelier couché dans un champs tellement excédé qu’il ne pouvait qu’appeler
du secours qu’ils l’aidèrent à se relever et purent à peine le rendre chez le
déposant ; qu’après avoir couché chacun dans un lit les dits Robert et
Legurelier le déposant partit pour se rendre à Angoulins chez le sieur Félix
lieutenant de la douane pour le prévenir de ce cruel événement et n’y ayant
trouvé que son épouse et la femme du sieur Perault qui furent extrêmement
saisies à cette nouvelle dans la crainte que leurs maris fussent les personnes
assassinées, le déposant les rassura à cet égard et pria la dame Perault de
l’accompagner chez monsieur Bérigaud maire ce qu’elle fit puis le déposant
ayant fait part au dit maire du dit événement, celui-ci qui était malade envoya
chercher de suite le garde champêtre et prévenir le sieur Dutouquet receveur de
la douane pour qu’ils eussent à se transporter de suite chez le déposant et y
recueillir toutes les circonstances de l’assassinat dont il s’agit ; que
le déposant étant de suite retourné chez lui le dit sieur Dutouquet, le garde
champêtre, un nommé Brunet et d’autres ne tardèrent pas à y arriver ;
qu’aussitôt le sieur Dutouquet envoya de suite le déposant chez le sieur
Mouilleron officier de santé qui se trouva malade que chemin faisant il passa
au lieu où l’assassinat avait été commis et y vit deux tas de sel avec un
bissac ou un sac dont il ne s’empara point ; qu’étant venu rendre au dit
sieur Dutouquet que le sieur Mouilleron ne pouvait venir parce qu’il était
malade le sieur Rollin lieutenant d’ordre de la douane l’invita à aller à Aytré
chez le sieur Cadot chirurgien pour le prier de se rendre chez le déposant ce
que ce dernier fit et passant avec le sieur Cadot devant la porte du sieur
Durdez controleur ce dernier leur dit « Vous allez sans doute chez
Gourreau, je vais vous y suivre » ; que le déposant en se rendant
avec le sieur Cadot passa de nouveau au lieu de l’assassinat et y vit qu’on
avait épars les tas de sel et enlevé le sac ou bissac qu’il y avait vu et qu’il
a appris depuis avoir été trouvé par le nommé Brunet ; que le déposant
rendu chez lui avec le sieur Cadot ce dernier donna aux dits Robert et
Legurelier tous les soins qui dépendaient de son art et monsieur Durdez arriva
un instant après ; que le lendemain le dit sieur Durdez envoya plusieurs
préposés avec des chaises d’hôpital chez le déposant d’où ils enlevèrent les
dits Robert et Legurelier et les conduisirent à l’hospice de La Rochelle où le
déposant a appris depuis que Legurelier était décédé.
Le 12 avril 1809, suite à l’audition des neuf témoins, Germain Decourt
est de nouveau entendu par Côme-Pierre Godet, premier juge des cours de justice
criminelle et spéciale du département de la Charente-Inférieure. Le juge et son
commis-greffier assermenté François Nadeau mènent ainsi l’interrogatoire
suivant dans à la chambre du conseil du palais de justice :
- Quels sont vos nom, surnom,
âge, profession, lieu de naissance et demeure ?
- Je me nomme Germain Decourt,
vigneron, âgé de 48 ans, né à Saint-Médard et demeurant à Angoulins depuis la
Toussaint dernière
- Vers les 9 à 10 heures du soir
le 1er février dernier, n’avez-vous pas été trouvé avec les nommés Marboeuf,
Gabarret et Jard conduisant des sels sans en avoir acquitté les droits sur le
chemin qui conduit du Pont de la Pierre à la grande route de Rochefort ?
- Oui Monsieur.
- Ne fûtes vous pas arrêtés sur
ce chemin par les employés de la douane et au lieu de répondre aux sommations
qu’ils vous faisaient de leur présenter des pièces qui justifiassent que vous
aviez acquitté les droits de ces sels et de leur dire vos noms, professions et
domiciles n’êtes vous pas tombés sur eux armés de massues ou de triques en
forme de bâtons et ne les avez vous pas assaillis au point que vous les
laissâtes comme morts sur la place et que depuis l’un d’eux est mort effectivement ?
- Je n’ai ni vu ni entendu ce
qui s’est passé. J’avoue cependant que j’ai vu Marboeuf, Gabarret et Jard se
défendre contre les employés et leur porter des coups de bâtons, mais moi je
n’ai frappé personne ; je suis bien malheureux de m’être trouvé avec eux.
- Le 11 février dernier le maire
d’Angoulins ne s’est-il pas transporté au lieu de Lileau, votre domicile,
accompagné du garde champêtre, de quelques gendarmes et employés de la
douane ?
- Oui Monsieur.
- Où étiez-vous ce jour là car
vous n’étiez pas chez vous lorsqu’on y entra ?
- J’étais chez mon voisin
Marboeuf père de celui qui était avec Gabarret, Jard et moi sur le chemin qui
conduit du Pont de la Pierre à la route de Rochefort.
- Qu’étiez-vous allé faire chez
le dit Marboeuf ?
- Marboeuf avait mangé la soupe
avec moi et comme il pleuvait et qu’on ne pouvait pas travailler dehors il me
dit allons maintenant nous chauffer chez moi et j’y allai en effet pour passer
le temps.
- Il résulte du procès que ne
vous ayant pas trouvé chez vous le maire demanda à votre femme où vous étiez et
qu’elle répondit que c’était chez Boutet où vous étiez allé pour aiguiser une
serpe. Pourquoi fit-elle ainsi le mensonge lorsqu’elle ne pouvait ignorer que
vous étiez chez Marboeuf ?
- Il y a des femmes qui parlent
qui parlent comme elles savent, il ne lui en eût cependant pas plus conté de
dire que j’étais chez Marboeuf. C’est sûrement le transport où elle était de
voir tant de monde chez elle qui lui fit dire cela.
- Vous venez de nous dire que
vous vous étiez retiré chez Marboeuf pour y passer le temps et vous y chauffer
et cependant lorsque le maire se présenta chez ce particulier il lui demanda
s’il vous avait vu et sa femme et lui répondirent que non. Ce ne fut qu’après
avoir fait plusieurs recherches dans le grenier ou chambre haute du dit
Marboeuf qu’on vous y rencontra caché entre la paillasse et le lit. Pourquoi ce
déni de la part de Marboeuf que vous fussiez chez lui et pourquoi vous y
trouviez vous ainsi caché entre une paillasse et un lit ? Si ce n’est parce
que complice de l’assassinat dont il s’agit, vous cherchiez à vous soustraire
aux recherches qu’on faisait de votre personne ?
- J’ignore pourquoi Marboeuf nia
que je fusse chez lui. Tout ce que je sais c’est que quoi que je m’y refusasse
ce fut lui qui me força de me cacher dans son grenier.
- Jard n’était-il pas avec vous
chez Marboeuf ?
- Non Monsieur.
- Quelques temps après
l’assassinat dont il s’agit les sieurs Dutouquet et Durdez receveur et
contrôleur de la douane n’allèrent-ils pas chez vous ?
- Oui
- Pourquoi dès que vous convenez
avoir été du nombre des fraudeurs trouvés sur le chemin du Pont de la Pierre au
Pas des Eaux répondîtes vous à ces messieurs que vous n’aviez d’autre
connaissance de l’assassinat dont il s’agit si ce n’est que vous en aviez
seulement entendu parler au prône du dimanche par le curé du lieu ?
- Il est vrai que je me suis
expliqué ainsi et j’en suis fâché, j’aurais bien dû plutôt dire la vérité.
- Comment votre linge est-il
marqué ?
- Je ne saurais vous le dire car
je ne connais point dans l’écriture.
- Dans quoi aviez-vous placé le
sel que vous charroyiez la nuit du 1er au 2 février ?
- Dans un sac rapiècé de toile
de moyenne grosseur
- Ce sac était-il marqué ?
- Il avait été marqué il y a
deux ou trois ans en rouge par un farinier qui me dit qu’il y avait mis mon
nom.
- Emportâtes-vous ce sac avec
vous après avoir été arrêté par les employés de la douane ?
- Non Monsieur, je m’enfuis de
suite et laissais là ce sac et le sel.
- Et à l’instant avons présenté
au répondant un sac de toile rousse rapiècé en plusieurs endroits et marqué de
plusieurs tâches jaunâtres ayant à son ouverture un lien de petite corde ou
ficelle et sur l’une de ses faces le mot DECOUR dont l’U en forme de V est
élevé entre l’O et l’R. Le dit mot empreint en couleur rouge et l’avons
interpellé de nous dire s’il reconnaissait le dit sac pour être le même que
celui dans lequel il avait placé le sel dont il était nanti sur le chemin du
Pont de la Pierre au Pas des Eaux et conduisant sur la grande route de
Rochefort vers les 9 à 10 heures du soir du 1er au 2 février
- Qu’il le reconnaissait
parfaitement pour être le même dans lequel était son sel qu’il laissa avec le
dit sac au sus dit lieu et à la sus dite époque
- Avez-vous fait le choix d’un
conseil ?
- Je prends M. Lebrun avocat
- Qu’elles peuvent être les
tailles des dits Marboeuf, Jard et Gabarret ?
- Marboeuf peut avoir environ 5
pieds 6 pouces, Jard 5 pieds 7 pouces et Gabarret 4 pieds 10 pouces environ.
L’interrogatoire se clôt avec la lecture des différents procès
verbaux, plainte et autres pièces de la procédure avant que l’accusé ne
persiste dans ses réponses.
Le 17 avril 1809, le dossier de procédure est complété par le
certificat du médecin confirmant que Legurelier est bel et bien mort de ses
blessures. Le chirurgien en chef de l’hôpital militaire d’Auffredy indique que
le préposé est entré pour y être traité « d’une plaie grave à la partie postérieure de la tête avec dénudation
d’une portion de l’occipital et que par la suite des accidents et surtout de la
pourriture d’hôpital il est mort des suites de cette blessure »
Le 3 mai, la cour spéciale du département de la Charente-Inférieure est
réunie en la chambre du conseil sur la convocation du président de la cour de
justice criminelle. Après avoir entendu le rapport et ses conclusions du
procureur général impérial sur les faits imputés aux quatre mis en cause, elle
déclare que le délit dont les prévenus sont accusés - contrebande avec armes et
attroupement en entrant des sels sans en avoir acquitté les droits - est bel et
bien classé par les articles 1er, 2e et 3e de la loi du 13 floréal de l’an XI
et qu’à ce titre il est bien de sa compétence.
La cour de justice criminelle et spéciale ordonne alors un jugement de
fond dans les plus brefs délais. L’arrêt de compétence est ensuite signifié au
prévenu présent dans les 24 heures et notifié aux domiciles respectifs des
trois contumax par exploit d’un huissier le 7 mai. Personne ne s’étant trouvé
aux domiciles des trois absents et conformément à l’article 462 du code des
délits et des peines, Jacques Garnier le président de la cour de justice
criminelle spéciale de la Charente-Inférieure émet, le 18 mai, une notification
à Alexis Jard, Pierre Gabarret et Louis Marboeuf de se présenter dans les 10
jours. Cette ordonnance est publiée par l’huissier Jean-Marie Alexis Barbet dès
le 21 mai à son de trompe et de caisse à Angoulins et une copie est affichée à
la porte du domicile de chacun des trois fuyards. Le 1er juin suivant, ne
s’étant pas présentés, et conformément à l’article 464 du code des délits et des
peines, les trois sont alors déclarés rebelles à la loi et déchus des titres et
droits de citoyens français. Tous leurs biens sont donc désormais séquestrés au
profit du trésor public pour le temps de leur contumace. Cette nouvelle
ordonnance est publiée est affichée par huissier le 6 juin.
Le 14 juin, la justice suit son cours et Pierre Hector Savary le
procureur général impérial en la cour de justice criminelle spéciale de la
Charente-Inférieure résume toute l’affaire et sa chronologie avant d’énoncer l’acte d’accusation.
Deux jours plus tard, le 16 juin, une assignation à comparaitre le
jeudi 29 juin est ordonnée par le président de la cour de justice criminelle
spéciale pour que les douze témoins soient de nouveau entendus oralement sur
les faits et circonstances de la procédure. Moins d’une semaine plus tard,
l’huissier Barbet notifie l’assignation à Louis Boutet, Michel Jean, Jean
Rollin, Louis Robert, Benoit Joseph Dutouquet, Charles Durdez, François Elie
Bérigaud, Charles Brunet, Louis Paillet, Marguerite Rochet, Jean Gourreau et
pierre Etienne Cadot
A l’approche du jugement, nous découvrons avec intérêt les documents
versés dans le dossier de procédure à la faveur de l’accusé Decourt : tout
d’abord une lettre de 14 signataires de La Jarne qui attestent en leur âme et conscience « que le nommé Louis Germain Decour, jardinier, père de 5 enfants,
habitant à La Jarne depuis 32 ans nous a toujours été connu pour un honnête
homme, tranquille et incapable d’aucune mauvaise action. Qu’il ne nous a jamais
parvenu aucune plainte contre lui et que sa conduite nous a toujours paru
exempte de reproches... ». Nous trouvons aussi une autre pièce qui
parait provenir de son avocat « Voilà
encore ma malheureuse recommandée qui va assister au jugement de son mari. Je
lui avait conseillé d’emmener tous ses enfants pour exciter la pitié des juges.
Ses moyens ne lui ont pas permit. Elle en a de très jeunes. Il parait
certain que son mari n’a pas frappé les préposés des douanes, l’un d’eux appelé
et interrogé dans le cours de la procédure a déclaré ne pas connaître ce
Germain Decourt et par conséquent ne l’avoir vu porter aucun coup : un
pareil témoignage n’est pas sans force. Tous les habitants de l’endroit, tous
ceux qui connaissent Decourt répètent sans cesse que cet homme est d’un
caractère doux et paisible, qu’il n’a jamais fait de mal à personne et qu’il
n’est pas du tout vraisemblable que ce soit lui qui ait frappé les deux
douaniers. Sa prison, son procès, la perte de son temps et les voyages de sa
femme ont expié la faute qu’il a commise. Je sens bien que les juges sont
appelés à donner un exemple, mais il serait trop rigoureux d’y faire servir ce
malheureux Decourt. Il a cinq enfants dont
trois filles en bas âge et son travail est sa seule ressource... »
Le 29 juin 1809, la sentence est rendue : condamnation de la
peine de mort pour les trois jugés par contumace quant à Germain Decourt la
sienne est portée à la peine de 10 ans de fers. Ce dernier doit aussi être
préalablement attaché à un poteau sur un échafaud pour y rester exposé aux
regards du public pendant 6 heures. C’est ainsi que le 1er juillet, en vertu de
l’arrêt, l’huissier accompagné d’une brigade de gendarmerie conduisent Germain Decourt
sur la place publique de Saintes qui mérite une peine afflictive et infamante. Ils le font attacher au poteau le
condamné ayant au-dessus de sa tête « copie en placard de l’arrêt de
justice ». Après être resté « depuis l’heure de six heures du matin
jusqu’à celle de midi » Germain Decourt est détaché par l’exécuteur des
arrêts criminels Franspirket et reconduit à la maison de justice. Sur trois
autres poteaux les copies en placard de la condamnation à la peine de mort
contre Alexis Jard, Pierre Gabarret et Louis Marboeuf sont aussi clouées.
L’affaire rebondit en 1818 avec l’arrestation d’Alexis Jard qui a donc
été condamné à mort par contumace depuis 9 années. En effet, le 4 juin 1818, à 2
heures du matin, le lieutenant de
gendarmerie de La Rochelle accompagné du maréchal des logis et de ses
gendarmes se transportent dans les marais de Voutron, et cernent à la cabane de
Loirel située en face de l’auberge des Trois Canons. Dans la maison Alexis Jard
est arrêté. Le 13 juin suivant il est interrogé par le juge au tribunal civil
de l’arrondissement de Saintes. Voici le procès verbal qui nous est
parvenu :
- Quels sont vos nom, prénom, âge, profession,
lieu de naissance et demeure ?
- Je me nomme Alexis Jard, âgé
de 36 ans, cultivateur né en la commune de Dompierre, ayant demeuré en celle de
Salles et en dernier dans celle de Thairé, fils de feu Charles jard cultivateur
et de Jeanne Morisset de la dite commune de Dompierre, marié à Louise Gabarret
qui est vivante dans la commune de Voutron.
- Avez-vous connu les nommés
Decourt, Gabarret et Marboeuf ?
- Oui monsieur.
- Le premier février 1809 vers
les 10 heures du soir, n’avez-vous pas été rencontrés par les préposés des
douanes du poste d’Angoulins conduisant des sels sans avoir acquitté les
droits, sur le chemin du Pont de la Pierre à la grande route de Rochefort avec
les trois particuliers que je viens de vous nommer ?
- En effet je me suis trouvé le
jour et heure ci-dessus avec Decourt, Gabarret et Marboeuf mais ce n’était
point pour faire la fraude. J’allais seulement chercher du sel dans un bissac
pour ma provision. Nous apparurent à environ 30 pas de distance des préposés
sans pouvoir vous en dire le nombre, je renversa mon bissac de sel et me
sauvais ne voulant pas être connu ni arrêté par eux
- N’étiez-vous pas armé de
bâtons ou autres armes quelconques ?
- Non monsieur, je sortais de
labourer mes vignes dans lesquelles j’avais laissé mon instrument de labourage
- Vous êtes vous aperçu qu’il se
soit engagé une action entre les préposés et ceux qui étaient avec vous ?
- Non monsieur puisque j’avais
pris la fuite à l’instant même que j’avais aperçu les employés
- A peu près à cette époque,
n’avez-vous pas pris part avec Marboeuf, Decourt et Gabarret à une rixe qui a
eu lieu avec deux préposés du côté d’Angoulins et près le lieu dit du Pont de
la Pierre ?
- Non monsieur, je n’avais pas
passé par ce chemin là
- Sur quel chemin étiez-vous
lorsque vous avez pris la fuite ?
- Sur celui qui conduit
d’Angoulins à Salles
- Où demeuriez-vous alors ?
- Au lieu de Loubinat, commune
de Salles
- Depuis votre fuite jusqu’au
moment de votre arrestation où avez-vous passé votre temps ?
- Dans les communes de Thairé et
de Mortagne qui ne sont éloignées de Salles que d’une demie lieue
- Par quels motifs vous
étiez-vous sauvé ?
- J’ai resté huit jours consécutifs
dans ma maison en la commune de Salles et tous mes voisins m’ayant dit qu’il
était arrivé du mal à des employés des douanes et que je pourrais être arrêté,
je me déterminais à changer de commune.
- Je vous observe que si vous
n’étiez prévenu que d’une simple contravention vous ne pouviez jamais encourir
qu’une amende et qu’en prenant la fuite vous vous faisiez présumer coupable du
crime dont vous êtes aujourd’hui accusé
- Je n’en savais pas davantage
- Persistez-vous à soutenir que
vous n’avez pas eu connaissance de l’action qui a eu lieu le premier février
1809 dans la nuit entre les employés des douanes et Marboeuf, Gabarret et
Decourt ?
- Oui monsieur, je persiste dans
les réponses à cet égard
- Avez-vous fait choix d’un
conseil pour vous aider dans votre défense ?
- Je prends monsieur Brune
avocat à Saintes
Une nouvelle enquête étant projetée suite à cette arrestation, le procureur
du Roi se renseigne quant au devenir des personnes citées dans l’affaire de
1809 afin de les convoquer : On apprend ainsi que M. Rollin est décédé, M.
Robert est devenu sous lieutenant à La Repentie près de La Rochelle, M.
Dutouquet est vérificateur au bureau de Marans, M. Durdez est toujours contrôleur
des brigades à Aytré, quant à Perault il a donné sa démission. Germain Decourt
est quant à lui aussi décédé, le 25 mai 1812 à l’hôpital maritime du port de
Rochefort. Le 19 octobre 1818, Louis Robert, Charles Durdez, l’officier de
santé Cadot, Benoit Joseph Dutouquet, François Elie Bérigaud, Louis Paillet,
Charles Brunet, Jean Gourreau et la veuve de Germain Decourt sont assignés à
comparaitre. Seuls cinq témoins (Bérigaud atteint de dissenterie, Louis Paillet
malade d’une fièvre catarrhale, Dutouquet excusé et Gourreau décédé) se
retrouvent alors le 17 novembre 1818 dès 8 heures du matin afin de témoigner
devant la cour d’assises au Palais Royal de Saintes. Le procès verbal des
débats nous est lui aussi parvenu : Alexis Jard est placé sur son banc
encadré par les gendarmes puis le président fait l’appel nominal des douze
jurés qui s’assoient en face de l’accusé après avoir prêté serment. L’acte
d’accusation est lu. Les témoins répondent à l’appel de leur nom et se
présentent dans la salle d’audience publique avant de se retirer dans une
chambre spéciale. Le président ouvre alors les débats et les témoins se
succèdent et déposent sous serment les uns après les autres. L’accusé répond,
le procureur développe l’accusation, l’avocat de la défense plaide. Le
président ferme alors les débats avant de résumer l’affaire. Il énonce alors au
jury les deux questions qui résultent de l’acte d’accusation : Alexis Jard
est-il coupable d’avoir fait partie de la rébellion armée de trois personnes ou
plus qui a eu lieu le 1er février 1809 contre les préposés des douanes
d’Angoulins ? Et dans cette réunion à main armée de trois personnes ou
plus a-t-il volontairement à l’aide des armes dont il était porteur fait des
blessures aux préposés des douanes lesquelles ont occasionné la mort du sieur
Legurelier ? Les 12 jurés se retirent alors dans leur chambre afin de
délibérer à huis clos. La délibération terminée les jurés reviennent dans la
salle d’audience publique et le président leur demande le résultat de
l’échange : le chef du jury se lève et la main sur le coeur déclare que
selon eux l’accusé n’est pas coupable aux deux questions posées. Le président
applique alors l’article 358 du code d’instruction criminelle et prononce
l’acquittement. L’accusation portée devenant nulle le
président ordonne la remise en liberté d’Alexis Jard.
Personnes citées
1. Accusés
- Germain Decourt (1770, Saint-Médard - 25/5/1812, Hôpital maritime de
Rochefort) fils de Louis et de Madeleine Vaude. Laboureur, jardinier, vigneron,
demeurant à Angoulins, a vécu 32 ans à La Jarne. Marié à Marie Auprêtre, père
de 5 enfants.
- Pierre Gabarret, canonnier demeurant à Angoulins, taille 4 pieds 10
pouces environ
- Louis Marboeuf, vigneron et canonnier demeurant à Angoulins, taille environ
5 pieds 6 pouces. Fils de Louis. Départ vers Ruffec (Charente) dans une
forge ?
- Alexis Jard (1779, Dompierre - NC) fils de feu Charles Jard
cultivateur et de Jeanne Morisset. Cultivateur, demeurant Loubinat à Salles,
puis s’installe à Thairé. Taille 5 pieds 6 pouces, yeux gris, bouche moyenne,
menton fourchu, nez gros, marqué de petite vérole. Marié à Louise Gabarret.
Malgré sa fuite entre 1809 et 1818, Alexis Jard ne semble pas s’être caché car
il déclare, dans les registres de l’état civil de la commune de Thairé, la
naissance de ses jumeaux (Michel et laurent) le 11 février 1815 (Alexis demeure
à cette date au Rozé commune de Thairé) et leur mort les 22 et 27 mars 1815.
2. Personnel de la douane
- Louis Robert (1784-NC), victime, préposé des douanes à Angoulins, y
demeurant, puis sous lieutenant à La Repentie près de La Rochelle.
- Pierre François Thomas Legurelier, victime, préposé des douanes à
Angoulins, (7/11/1772, Boulleville (Manche) - 5/4/1809, La Rochelle) fils de
Pierre et de Françoise Jean.
- Charles Durdez (1760 - NC), capitaine et contrôleur de brigade des
douanes à Aytré.
- Benoit Joseph Dutouquet (1771, Hasnau (Nord) - 4/4/1840, La Rochelle),
receveur des douanes à Angoulins, adjudant-major au 93e régiment de ligne, membre
de la légion d’honneur, puis vérificateur au bureau de Marans et à La Rochelle.
Epoux de Marie Thérèse Montagné. Une fille connue : Elizabeth Zénobie née
le 23/03/1808 à Angoulins et mariée à La Rochelle en 1835.
- Gabriel Félix (1775 -NC), lieutenant de la douane à Angoulins marié
à Louise Anne Courtois
- Jean Rollin (1754 - NC), lieutenant d’ordre des douanes à la
résidence d’Angoulins, y demeurant. Marié avec Marie Madeleine Clodot d’où est
issue Madeleine (03/03/1803, Angoulins - 2/12/1805, Angoulins).
- Charles Pérault, préposé/employé des douanes demeurant à Angoulins.
Marié à Marguerite Rochet (1769 - NC).
3. Santé, justice et
gendarmerie (Saintes et la Rochelle)
- Pierre Etienne Cadot (1762 - NC), officier de santé de première
classe aux Armées de l’Empire français, commissionnaire du 3 octobre 1792 par
le Ministre de la Guerre faisant son domicile à La Rochelle.
- Pierre Hector Savary, procureur général impérial
- Pierre Nicolas Janson, huissier audiencier
- Jean-Marie Alexis Barbet huissier
- Côme-Pierre Godet, premier juge des cours de justice criminelle et
spéciale du département de la Charente-Inférieure
- François Nadeau, greffier
- Jacques Garnier président des cours de justice criminelle et
spéciale au département de la Charente-Inférieure, membre de la légion
d’honneur
- Franspirket, exécuteur des arrêts criminels
- François Grosnoury et Georges Legros, gendarmes impériaux de La
Rochelle
- Roy, magistrat de sureté
4. Autres angoulinois
- François Elie Bérigaud (1760, Brigueil (Charente) - 19/12/1828,
Angoulins), notaire et maire de la commune d’Angoulins, y demeurant. Fils de
Elie et de Jeanne de la Borderie. Marié à Madeleine Rocheteau en 1791 à
Angoulins.
- Pierre Louis Paillet (11/7/1768, Champeau (Vienne) - 12/10/1835,
Angoulins), garde-champêtre, maçon, garde-écluse, journalier, demeurant à
Angoulins. Marié à Suzanne Lafosse (le 29/12/1794 à Angoulins) puis à Isabelle
Bertrand (18/4/1796 à Angoulins).
- Charles Brunet (1767 - NC), cultivateur et mesureur/juré en sel,
demeurant à Angoulins. Marié avec Marie-Anne Guitteau
- Jean Gourreau (1754, Brussières (Loire-Atlantique) - 12/12/1810,
Angoulins), meunier farinier, demeurant au moulin du Pont de la Pierre commune
d’Angoulins. Marié avec Marie Françoise Millon. Une de leur fille, Suzanne, se
marie en 1819 à Angoulins.
- Louis Boutet (20/5/1763, Salles - NC), propriétaire, jardinier,
demeurant à Lisle commune d’Angoulins, voisin. Marié avec Marie Louise Arnoux (le
13/6/1786, Salles), puis Bariteau Catherine (le 27/12/1802, Angoulins) et enfin
à Jeanne Chesserand (le 15/1/1830, Angoulins). 11 enfants relevés.
- Jean-François Personnat (1770, Champagnole - 29/1/1827, Aytré),
lieutenant des gardes-côtes. Marié avec Thérèse Haberkorn. 4 enfants connus.
5. Divers
- Michel Jean, régisseur du château de Cramahé, âgé de 58 ans
demeurant à Salles
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