Les trois aéronautes de 1914

En 2001 et 2002, (cf  Le Colporteur, n°3 pages 1 et 2 et Le Colporteur n°4 page 6), je publiais dans la petite revue associative de l’Expression-Hist un souvenir de Monsieur Paul Nadeau intitulé « Un événement inattendu à Angoulins en 1913 » et dont voici le contenu : « En 1913, l’élève sous-officier d’infanterie Félix Nadeau, pendant un séjour au camp militaire de La Courtine, vit un ballon sphérique passer au-dessus du camp. La Courtine est située dans le département de la Creuse, 30 km au sud-sud est d’Aubusson. Ayant à sa disposition des cartes d’Etat-major ainsi que des instruments de repérage, il put assez facilement déterminer la direction prise par le ballon et vit qu’il se dirigeait en direction d’Angoulins. Il écrivit aussitôt son observation à ses parents, eux-mêmes habitants d’Angoulins. Compte tenu des erreurs d’appréciation et surtout des sauts de vent pendant le parcours du ballon, la probabilité que celui-ci atterrisse effectivement à Angoulins était infime. Et pourtant, c’est ce qui se produisit. A l’approche de la mer les aéronautes se hâtèrent d’atterrir et leur ballon se posa dans un champ à Angoulins. Les témoins de cet atterrissage accoururent pour accueillir et aider les aéronautes. Ceux-ci étaient deux Allemands et parlaient correctement le français. Ils demandèrent à être présentés aux autorités locales, et ils furent conduits à la mairie. Or ce jour là était un jour d’élections (donc un dimanche) et le président du bureau de vote était Félix Jacques Nadeau, le père de l’aspirant-sergent qui avait vu passer le ballon au-dessus de La Courtine. Les Allemands s’excusèrent en faisant part de leur souci de ne pas perturber le vote par leur présence, mais ils furent néanmoins invités à entrer dans les bureaux de la Mairie (très exigus en ce temps là ). Ils furent ensuite hébergés au Château de la Sapinière. Quant à la lettre qui annonçait d’une façon très hasardeuse leur arrivée, elle parvint à destination bien après eux. Observations : Ce récit je l’ai entendu dans mes jeunes années ; il est très incomplet, car je ne peux relater que ce dont je me souviens encore. Il serait souhaitable de le recouper et de le compléter éventuellement par des souvenirs d’autres Angoulinois qui auraient été informés de cet événement. A ce sujet, bien des questions se posent. Par exemple : quels étaient la date et le lieu d’atterrissage ? quel était le point de départ en Allemagne ? On peut noter que le trajet du ballon fut très éloigné de la ligne droite et probablement assez fantaisiste en raison des courants aériens, car si l’on prolonge vers l’est une droite reliant Angoulins à La Courtine, on aboutit en Italie ! Les deux aéronautes étaient-ils de simples particuliers connaissant les techniques de l’aérostation et amateurs de navigation aérienne ? Ou bien des officiers de l’armée du Kaiser ? Combien de temps furent-ils hébergés à La Sapinière ? Qu’advint-il de leur ballon et de leurs équipements aérostiers ? La préfecture eut-elle à intervenir dans cette affaire ? »


Le ballon dirigeable à terre


Les pilotes au sortir de la mairie

Malgré l’appel lancé alors par l’association, les questions de Paul Nadeau étaient restées sans réponse. Mais récemment, en dépouillant les journaux locaux j’ai enfin pu trouver une note éclairant toute l’affaire. En effet, dans le journal « La Charente-Inférieure » (80e année, n°34 du mercredi 29 avril 1914) un article corrige le témoignage et nous renseigne mieux sur l’affaire : « Trois allemands montant un sphérique ont atterri dimanche dernier vers 11 heures du matin à Angoulins-sur-mer, à 500 mètres du rivage. La violence du vent a rendu leur atterrissage difficile. Les aéronautes ont été légèrement contusionnés. Ce sont trois industriels de Barmen (Allemagne), MM. Bruno Schmitz, Hugo Kaufen, et Kall Wascher qui s’entrainaient en vue de la Coupe Gordon Bennett. Ils étaient partis samedi soir de Barmen dans l’espoir de gagner l’Espagne. Les trois aéronautes n’étaient porteurs d’aucune vue photographique. Le préfet de la Charente-Inférieure s’est rendu sur les lieux, ainsi que M. Cottoni, commissaire spécial, après avoir été prévenu par M. Pigeonnier, maire de la commune. Après les formalités remplies, M. Landrodie télégraphia au ministre pour lui demander des instructions. Mardi matin le ministre a répondu à M. le Préfet qu’il l’autorisait à prendre une décision. Les trois aéronautes sont partis pour Paris mardi soir. Ils ont témoigné leur gratitude pour les égards que l’on avait eus pour eux. »  



Information de Denis Briand

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire